L’artiste en son atelier
« Je suis un type qui peint et non un artiste…en toute simplicité. »
Dit-il.
Nous pourrions dire avec l’âme et le talent d’un artisan. Travailleur, tenace, attentif et appliqué.
Si le village est le lit qui l’a vu naître, l’atelier reste le ventre qui l’a enfanté.
Dans cet atelier qu’il a fait sien, son père charron-forgeron travaillait le bois et le fer. Dans des ambiances ignescentes le papa battait les fers rougis pour en cercler des roues des charrettes, chariots et autres tombereaux utilisés dans les campagnes environnantes. Jusque dans les années soixante.
Dans ce lieu, ouvert à l’époque sur le monde rural, René a envahi l’espace et cloisonné de nombreux recoins pour y créer : là l’atelier de peinture, là la réserve des toiles, là encore le bureau à dessins. Il a cependant conservé l’ensemble des machines, forge, outils et matériels que son papa utilisait il y a un demi-siècle.
Dans un univers de chevalets, tubes de couleurs, pinceaux et palettes, le peintre puise ainsi toute l’énergie que le père mettait à son ouvrage. Il n’y a jamais loin de l’artiste à l’artisan.
On devine qu’ici le feu a crépité, sombre et incandescent. On sait que des fumées âcres de métal et de charbon rougis dans une même fusion ont irrité des yeux. On imagine que des coups de marteaux sur l’enclume ont scandé les heures de dur labeur. On soupçonne le charron heureux à la fin de la journée lorsque la roue tourne enfin sur son essieu. Et l’on perçoit que demain viendra trop vite pour que la fatigue ne soit vaincue.
Depuis cinquante ans ; rien de tout cela, mais tout cela quand même…
René vit, pense, peint dans l’univers que lui a légué son père. La même atmosphère, les mêmes fluides, la même ambiance enveloppent le fils après le père.
Plus le silence.
Texte de Daniel DUVAL